Migrants du Mozambique dans le Johannesburg de l'après-apartheid Travail, frontières, altérité
La fin de l'apartheid et l'instauration d'un régime démocratique en Afrique du Sud ont modifié l'expérience de la migration du sud du Mozambique vers la région de Johannesburg qui, depuis la découverte de gisements aurifères à la fin du XIXe siècle, a drainé des millions d'hommes. Aujourd'hui, la plupart des migrants mozambicains ne travaillent plus comme dans le passé dans les mines de façon contractuelle, mais dans l'économie informelle de la ville où ils rencontrent l'hostilité des Noirs sud-africains, eux-mêmes victimes de discrimination par la minorité blanche au temps de l'apartheid. A partir d'une enquête menée à Maputo et à Johannesburg, ce livre prend pour focale ce changement de cadre migratoire au travers duquel se donne à voir l'entrecroisement de dynamiques, indissociablement sociales et politiques, que les déplacements entre les deux pays révèlent selon différentes déclinaisons. Cette étude des migrations internationales examine l'idée de frontière sous au moins trois angles. Celui, d'abord, des frontières étatiques dont la mise en place et le développement ont été analysés comme l'élément politique permettant de distinguer l'immigration moderne d'autres formes de mobilités. Celui de la recherche urbaine, ensuite, qui montre que les grandes métropoles, tout en constituant plus que jamais des destinations pour les migrants, voient se développer des frontières socio-spatiales résultant de l'action de ceux qui cherchent à se protéger de l'altérité. Celui, enfin, des travaux sur l'ethnicité soulignant que les frontières ethniques se construisent souvent dans les relations entre immigrés et populations plus anciennement installées. La présence de frontières dans le rapport à autrui est omniprésente dans les logiques d'action de ces migrants du Mozambique à Johannesburg. L'adversité qu'ils affrontent en migration les amène à chercher à se fondre dans l'environnement urbain sur un mode principalement individuel et, en même temps, à se définir comme un groupe doté d'attributs valorisables, afin d'établir un rapport positif à soi dans un monde déstabilisant pour l'identité personnelle.