La petite femelle
Qui se souvient de Pauline Dubuisson ? Elle fut célèbre dans les années 1950 pour avoir assassiné son amant et son procès très médiatisé inspira, entre autres, Georges Clouzot qui, dans La Vérité, offrit à Brigitte Bardot un de ses plus beaux rôles. Une des répliques de ce film ("Je suis une petite femelle et il faut me laisser faire ce que j'ai envie") donne d'ailleurs son titre au roman de Philippe Jaenada. Qui est donc cette Pauline Dubuisson dont la France entière réclame la tête en ce mois d'octobre 1953 ? Une femme froide et calculatrice ? Un monstre de duplicité qui, jeune fille, a couché avec les Allemands et a été tondue à la Libération ? Qui, plus tard, a usé de ses charmes pour voler les vieux messieurs ? Et qui, enfin, ivre de jalousie, a tué de sang-froid un jeune homme de bonne famille ? Ou est-ce, bien au contraire, une jeune femme libre dans sa tête et dans son corps que les circonstances et les soubresauts de l'Histoire ont broyée sans pitié ? Une aventurière qui revendique son émancipation et interroge avant l'heure la place des femmes dans une société haineuse ? Que Pauline soit coupable, Philippe Jaenada n'en disconvient pas, mais il cherche à comprendre pourquoi personne n'a jamais voulu écouter ce que Pauline avait à dire, elle qui, durant tout cette horrible affaire, n'a jamais menti. Ce roman est le récit de la quête interminable, quasi obsessionnelle, que Philippe Jaenada a menée pour révéler la vérité la plus intime de cette femme. Mais il retrace aussi la manière dont ce travail exténuant a modifié sa propre vie. Il a tout lu, tout écouté, soulevé toutes les pierres. Chez Philippe Jaenada, l'oeuvre est indissociable de la vie de l'écrivain, comme la truite est indissociable de la rivière. C'est le propre des véritables artistes. Et cerise sur le gâteau, pour le plus grand bonheur de ses lecteurs, Philippe Jaenada est toujours aussi drôle.