Susto
Sur l’île de Ross, aux confins de l’Antarctique et à une date indéterminée, le volcan Erebus couve la ville de Susto, métropole mythique à la population cosmopolite, fourmilière de colons, de mineurs, de triades, de minutemen et d’enfants perdus. Cité en éventail scindée par des murs jadis protecteurs, mais devenus instruments d’oppression, Susto est le théâtre des soubresauts des derniers représentants d’une humanité aux abois. Les sustoïtes tentent de s’y bâtir une existence, grondent à l’unisson, résistent, se repoussent et s’attirent au cœur de cette Pompéi australe. À l’instar des romans picaresques et des feuilletons du XVIIIe, le récit brasse tous les genres à sa disposition – comics, voix radiophoniques, pulp et roman populaire jusqu’au théâtre antique – en une fresque chorale qui épouse le rythme de l’éruption, volcanique et sociale. On y croise une vulcanologue étudiant les stades du cataclysme ; un héros masqué devenu le porte-drapeau des mineurs hispano-japonais spoliés ; un espion qui écoute pour le compte du gouvernement ; une prophétesse (aux accents volodiniens) scandant les appels à la révolte dans des messages poétiques cryptiques ; une ancienne incantatrice... Mais quel désastre, de la colère d’Erebus ou des révolutions humaines, aura finalement raison de leurs faibles espoirs ? Susto désigne, dans la langue des Indiens d’Amérique, la « maladie de la frayeur », celle qui « laisse l’âme ailleurs » et niche en chacun de nous. Susto est le roman de nos peurs collectives, une fresque urbaine dont la conclusion funeste se veut d’emblée irrévocable. À lire également...