Fantastique et bande dessinée
Qu'on lui choisisse comme date et lieu de naissance la Suisse des années 1830, avec les récits et images de Töpffer, ou l'Amérique de la fin du XIXe siècle, avec les suppléments dominicaux en couleur de la presse quotidienne, la bande dessinée semble avoir toujours été propice à la création de récits et de séries fantastiques. On voit du reste assez pourquoi : ces nouveaux récits étaient en rupture avec les formes de la littérature réaliste et permettaient de créer, en quantités vertigineuses, des visions de lieux imaginaires. Des mondes oniriques de " Little Nemo " aux myriades d'animaux anthropomorphes s'exprimant par bulles, des " réalismes " décalés qu'illustrent les plus grandes séries du canon franco-belge aux ruptures esthétiques qu'inaugurent les jeunes Turcs de l'Association ou de Fréon, la bande dessinée depuis ses débuts semble susceptible de décliner à l'infini ses possibilités d'expressivité fantastique. Ce numéro d'Otrante veut avant tout rendre compte de cette diversité du fantastique dessiné. Le choix des sujets en témoigne : Batman et Donald Duck, mais aussi Jacobs et Schuiten, Andréas et Comès, Trondheim et les frères Deprez. Analysant récits, planches, cases et phylactères, les auteurs ici rassemblés proposent un éventail de regards sur des bandes dessinées " fantastiques " et sur la démarche créative des auteurs de bande dessinée lorsqu'ils " font " du fantastique, délibérément... ou à leur corps défendant !