Vie et mort de la jeune fille blonde
Le Livre: Célibataire endurci, bientôt quadragénaire, le narrateur trompe l'ennui d'une existence creuse entre belotes de comptoir, plateaux télé, aventures sans lendemain, et dîners parisiens sans intérêts autre que de donner « l'impression (fausse) de vivre des choses étranges. » Pourtant ce soir-là, chez Alice et Paul Muratti, après quelques whisky et le traditionnel duel de baffes organisé par les hôtes pour mettre leurs convives en appétit, quand le maître de maison évoque le destin de Céline, sa fille, adolescente incontrôlable, bientôt toxicomane, le narrateur, brutalement projeté vingt-cinq ans en arrière, se souvient : à Carcans-Maubuisson, par une après-midi ensoleillée, c'est Céline Muratti, il en est sûr, qui lui a fait découvrir, gentille et dépravée, les joies et les misères du sexe... Le narrateur part alors à la recherche de cette fille, jadis singulière Lolita de 13 ans, aujourd'hui droguée, prostituée, malade peut-être, épave misérable. Quête nostalgique mais aussi coupable de celui qui croit pouvoir retrouver, en même temps que le souvenir lumineux de sa jeunesse, un sens à sa vie... Esprit à la fois observateur et fantasque, Philippe Jaenada, avec cet humour qui caractérise son style, ici apparemment flegmatique, là laissant libre cours à la fragilité et l'émotivité des êtres, déroule son récit en une succession de scènes dont l'incongruité ou l'extravagance burlesque n'ont d'égal que la justesse. Vie et mort de la jeune fille blonde se lit comme une fable moderne où, contre toute attente, la drôlerie et la légèreté l'emportent sur la gravité du cours des choses...